« C’est une photo de famille qui date de 1952, un truc comme ça. Mon père c’est le petit. Ma tante c’est celle qui est en blanc à gauche. Le monsieur à côté, c’est Lionel qui a été élevé à la maison. Il y a le pépé Jean et la mère Juline, mes arrières-grands-parents. Et là c’est ma grand-mère et mon grand-père à côté. Mon grand-père, je l’ai pas connu, il s’est fait écraser sur la nationale. »

Mathieu en mars 2005 n’est pas encore officiellement installé comme paysan. « J’ai baigné dans l’élevage depuis que je suis tout petit. Ma mère faisait des veaux de lait. Il y a toujours eu des bêtes à la maison. Mes parents étaient obligés de m’attacher à un poteau parce que j’étais toujours au milieu des vaches et des taureaux. »

« Ortie, c’est la chienne de ma vie, je l’ai eue en 1998. On a tout partagé ensemble. Elle est morte en 2010, j’en ai pleuré. »

La ferme à l’hiver 2006. « Je reprends la ferme de mon père. Je m’installe un peu plus tôt que prévu et c’est ça que je veux faire depuis que je suis tout petit. »

Mathieu a apporté des compléments alimentaires aux vaches sur l’une de ses parcelles.

La stabulation, où vivent les vaches en hiver, juste avant qu’elle ne soit refaite à neuve.

Avec Madeleine, son ancienne voisine. « C’était ma troisième grande-mère. Quand on rentrait de l’école tous les gamins atterrissaient chez Madeleine. Elle nous faisait des gâteaux, des tartes, des chocolats. Elle m’a pris mon pain tous les mardi et vendredi jusqu’à sa mort. Son mari était sabotier et elle couturière. Je lui rentrais son bois dès l’âge de 6 -7ans. J’allais passer un coup de pelle aussi quand y avait de la neige. C’était ma pote Madeleine, elle était curieuse! Affreux! Toujours en train de poser des questions. »

« Quand on change les génisses, elles sont heureuses comme tout, elles ont de l’herbe toute fraîche. Ça fait plaisir à voir. Elles s’éclatent là, c’est pour ça qu’elles courent, surtout les jeunes. »

Au troquet du village d’à côté, Saint-Pardoux. « Il y a un gros problème de célibat dans le milieu paysan. C’est dû au manque d’ouverture du monde agricole vers le monde extérieur. Les jeunes restent avec leur mère qui est sur l’exploitation. Ils ne sortent pas beaucoup. Pour vaincre le célibat il faut s’ouvrir sur d’autres mondes et faut se donner les moyens de trouver quelqu’un aussi. »

Soirée avec Sébastien, un ami paysan.

Vue de l’intérieur du C15, la voiture passe-partout des paysans.

Mathieu change des vaches d’une parcelle à l’autre.

Moment de repos après avoir coupé du bois.

« Le gars il va passer sa vie à travailler pour payer le Crédit Agricole et s’acheter des gros tracteurs. C’est comme dans notre société, faut consommer. Il faut acheter le dernier tracteur de chez machin, la dernière voiture de chez Peugeot. On court à l’endettement de chacun comme dans le reste de notre société. »

« Un paysan, c’est un gars du pays. Tandis que « agriculteur », c’est un terme plus technique comme quoi t’es un chef d’exploitation, un businessman…Moi je me sens plutôt paysan qu’agriculteur. On est plus attaché à nos racines et à une tradition. On produit comme autrefois même si on a des tracteurs, même si on est équipé avec du matériel. Il y a de la solidarité dans le mot paysan. Pourtant paysan on dit que c’est péjoratif : t’es paysan, t’es le plouc, le cul terreux. Moi je préfère plouc qu’agriculteur. »

« Plus la terre est pauvre, plus les gens sont solidaires ce qui n’est pas le cas à 15 kilomètres d’ici, la terre est riche et là-bas c’est de l’individualisme pur. »

Partie de pétanque sur herbe avec Sébastien lui aussi paysan.

Soirée chez des amis de Mathieu.

Dans l’ancienne maison de son père attenante à la ferme en fin de soirée.

En juin 2008 avec Marco à gauche, avec qui il s’est associé, et son père Bernard à droite. « Mon père n’aurait pas dû faire paysan, il a fait ça par obligation parce que son père s’est tué sur la route nationale à côté. Les gens qui sont nés autour des années 50, c’était :  »qu’est ce que tu vas faire à la ferme, tu vois bien que c’est pas rentable ». Il fallait aller à la ville, prendre un appart, c’est la chanson de Jean Ferrat  »La montagne ». Dans la génération de mon père, il y a peu de paysans qui se sont installés parce que c’était pas viable. Il fallait partir et travailler chez Michelin ».

Il a refait à neuf la stabulation en 2006. « Avant, on avait le stockage au milieu et on traînait tout à la main. J’aimais bien, il y avait une belle lumière. On mettait une quarantaine de vaches, maintenant on en met soixante. »

« Il y a des contraintes mais on a quand même une liberté : on n’a pas de patron sur le dos, on n’a pas vraiment d’horaire. Quand c’est les foins et qu’il va pleuvoir faut se dépêcher, quand c’est les vêlages on se lève la nuit. Les contraintes maintenant sont de plus en plus administratives, on est poursuivi par des dossiers à remplir, des déclarations. »

Mathieu aide un veau a allaiter, il travaille parfois la nuit surtout en période de vêlage.

« En hiver, si tu rentres à 5h du matin, tu te couches pas et tu vas voir les vaches pour le pansage. Ça se fait. Je continue de sortir. Il y a trois semaines y avait une fête dans le village. Au milieu de la soirée une vache vêle, je me suis changé, j’ai tiré le veau et je suis retourné à la fête. »

Une baignoire sert d’abreuvoir pour les bêtes.

Mathieu s’occupe des papiers administratifs dans son bureau, plus tard c’est Marco son associé qui reprendra la tâche.

Repas avec Marco (au centre) et d’autres paysans après des travaux collectifs.

Marco : « J’espère être paysan le restant de ma vie mais je ne sais pas ce qui peut se passer. Les délais de prêts se sont raccourcis, donc moi faut que je finisse de payer mes premier emprunts. Si ça se trouve dans 10 ans je ne serai plus paysan, je ne sais pas. »

A chaque saison ses activités, en été c’est récolte de la paille.

Mathieu avec son père qui vient de temps en temps donner des coups de main sur la ferme.

« Je suis habitué au silence, j’aime bien écouter le vent, les oiseaux, c’est reposant. Moi ça me plaît le matin quand je vais voir mes bêtes, c’est reposant les vaches. On les regarde, on les observe, c’est joli, ça permet de se poser. Des fois quand je suis speed, je regarde une vache ruminer, ça me décompresse. »

Dans le garage de son ami d’enfance mort en 2008. « Gigi, j’y pense tout le temps. Je l’ai connu, j’avais cinq ans, il en avait trois. C’était mon frère, mon confident. On était toujours fourré ensemble avec son frère, on est souvent parti en vacances ensemble. Ça m’a plombé. Il a fait un choix, je vais pas lui en vouloir. Le jour où il était en train de se suicider, sans doute vers onze heures, midi, moi j’étais à quarante mètres en train de donner à manger aux bêtes. »

« Le petit jeune, c’est Pierrot. Il voulait s’installer mais son grand-père a tout fait pour le dégoûter. Aujourd’hui il est commercial dans une boite qui vend des aliments pour le bétail et des engrais. »

Mathieu a rencontré Aude quelques semaines avant cette photo.

Marco et son amie Élodie.

Jour de repos de Marco qui randonne au sommet du Puy-de-Dôme.

« Mes bêtes, je les caresse, je leur parle. Je parle même au tracteur des fois. A la naissance, elles ont toutes un prénom. »

Marco récupère une de ses vaches de l’abattoir.

Marco et Mathieu se sont associés avec un autre paysan, qui élève des porcs, pour monter un atelier de découpe de viande. Un lourd investissement mais qui leur permet de vendre quelques bêtes par mois en direct.

Marco livre lui-même des colis d’une dizaine de kilos dans les villages alentours.

Des deux paysans, c’est Marco qui s’occupe de la partie administrative.

Mathieu a retapé une grange dans le village où il s’est installé avec Aude, sa nouvelle compagne.

« Pendant six ans j’ai gagné 500 euros par mois, maintenant je gagne 1000 euros avec nos 60 heures par semaine. Avant il me restait 50 euros pour vivre par mois après avoir payé les prêts de ma baraque et les charges. »

De retour des courses, Mathieu plaisante avec un ami paysan (dans la voiture).

Luna, la fille d’Aude et Mathieu.

« Au niveau du canton on est presque tous à la Confédération Paysanne. On est solidaires quand il faut faire des gros chantiers, les moissons, l’ensilage…On travaille ensemble, on avance et ça crée une bonne ambiance. »

« La liberté aussi c’est que si t’as envie de prendre une heure pour aller faire des courses, il y a pas de problème. Un salarié ne peut pas le faire. Le matin quand tu te lèves, t’as pas besoin de prendre ta voiture, t’es chez toi. C’est une sacré liberté, tu respires. »

Sur le chemin qui mène de la ferme à sa maison avec les oies des voisins.

Mathieu est tellement fier de son métier qu’il affiche des vaches partout : sous forme de dessin chez lui, sur des autocollants dans sa voiture ou encore sur cette nappe.

Mathieu prodigue des soins à une bête.

Mathieu se sert de son ordinateur presque uniquement pour son travail.

« En étant à deux sur l’exploitation, on a réussi à se prendre du temps, des week-end, des vacances chacun, à partager le travail. Mon père a pris sa retraite. On change, on évolue, on a envie de vivre peut être plus chichement mais d’avoir une qualité de vie. »

Passage de la herse pour aérer le sol.

Mathieu tire à la carabine à plomb des pigeons qui viennent se nicher sous les toits de la ferme.

Une vétérinaire intervient sur un taureau pour un abcès.

Marco et Mathieu en pause.

Réunion de travail avec un autre paysan (de dos) avec lequel ils se sont associés pour monter leur atelier de découpe. En arrière plan : Aude, une voisine, Luna et le nouveau né Baptiste.

Luna et son père.

Baptiste le deuxième enfant d’Aude et Mathieu.

Mathieu a été élu conseiller municipal à Saint-Hilaire-La-Croix où vivent trois cent cinquante personnes.

Ration de compléments alimentaires pour les vaches.

Des vaches se sont échappées d’un enclos pendant la nuit. Mathieu et Erwan, un stagiaire, refont la clôture.

Bernard, le père de Mathieu, ancien maire du village et ancien conseiller général, discute politique avec Marco et Aude.

Mathieu et Aude partent une semaine en vacances direction la Bretagne avec leurs deux enfants. « En étant à deux sur l’exploitation avec Marco, on a réussi à se prendre du temps, des week-end, des vacances chacun, à partager le travail. On change, on évolue, on a envie de vivre peut être plus chichement mais d’avoir une qualité de vie. »

Sur les bords de l’Atlantique à Saint-Guénolé.

Mathieu, Aude et leurs enfants à Saint-Guénolé en Bretagne.

A l’été 2016, Aude et Mathieu baptisent leurs enfants à la mairie de Saint-Hilaire-La-Croix.

Sept jours sur sept, matin et soir, Mathieu et Marco font le pansage. Ils s’occupent des bêtes, les nourrissent et paillent la stabulation.

Dans le local technique de la mairie avec son beau frère Stéphane, employé communal à mi-temps.

Mars 2017. « J’ai attrapé plein de cheveux blancs depuis que j’ai des gosses et des soucis, c’est comme ça ! Je fais le gars cool mais je suis speed, je suis en faux calme. C’est pour ça que les vaches ça me détend, on s’équilibre. »

Fin août, il n’a toujours pas plu. L’herbe ne pousse pas et les bêtes n’ont quasiment rien à manger. Le père de Mathieu n’avait pas observé une telle sécheresse depuis la naissance de son fils.

Le couple s’est séparé durant l’été. Mathieu est seul à la ferme pendant que son ex-compagne et les enfants sont partie en vacances.

Mathieu et un artisan venu faire un devis pour agrandir la grange qu’il retape.

Repas de famille avec sa mère et son beau frère Stéphane.

Chez une voisine, coiffeuse.

Après une baignade dans l’étang de la commune.

Mars 2018, Mathieu travaille désormais tout seul depuis que Marco, son associé, a décidé de partir. Mathieu a dû lui racheter ses parts, le GAEC a été transformé en EURL.

« À 40 ans je commençais à sortir la tête de l’eau et paf ! Tu prends un coup. Ça fait 20 ans que tu bosses, que tu as tout créé et tu descends au fond du trou. Mais moi, je vais rebondir. »

Marco, chez lui, envoie des CV à la recherche d’un nouveau boulot.

Mathieu tire le bilan de la sécheresse de l’été 2018 : « c’est pire qu’en 2003 et 2015. L’herbe ne pousse plus, c’est fini, ça va geler. Entre la sécheresse et les prix qui ne se tiennent pas, y a une sacrée détresse chez les paysans. »

Les enfants ne vont plus à l’école dans le village à côté mais à Riom où habite l’ex-compagne de Mathieu, à une demi-heure en voiture de la ferme.

Après une heure de route, Mathieu livre à l’aube une bête à l’abattoir de Vichy.

Bernard, le père de Mathieu avec Luna et Baptiste. Il s’occupe des enfants pendant les vacances et donne un coup de main sur la ferme.

Avec Ingrid, sa nouvelle amie.

Avril 2019. Mathieu est seul sur l’exploitation, il a parfois un apprenti avec lui. « Je vais réduire le nombre de bêtes, j’ai encore 67 mères à vêler, je vais descendre à 50-55 mères. L’hiver dernier, j’en avais 93. »

Première livraison de trois tonnes d’aliments biologiques. « J’attaque la conversion pendant deux ans et puis après je serai labellisé agriculture biologique. Ça faisait longtemps que ça me titillait, j’avais fait mes stages il y a 21 ans dans le bio, c’est bien que j’y avais déjà réfléchi quand même. »

Mathieu s’occupe du jardin de son père parti en vacances. « Pendant deux ans je vais vendre en conventionnel alors que je vais travailler en bio. Ça va être difficile parce que je ne vais pas valoriser mes bêtes et comme je vais réduire le troupeau, financièrement ça va être un peu short. »

Moment de repos entre midi et deux.

Mathieu accueille dans sa ferme des étudiants d’une formation agricole.

Mathieu avec Bastien, qui effectue des remplacements et un maraicher.

Il fait deux marchés par mois pour vendre en direct, ici à Saint-Hilaire-la-Croix.

Ce premier avril 2019, Ghislain, l’ami d’enfance de Mathieu aurait eu 40 ans. « J’y pense tous les jours à Gi. »

Pour se soulager de la charge de travail, Mathieu fait appel au service de remplacement. Bastien vient l’aider une fois par mois.

Mathieu retape la grange dans laquelle il a habité un temps. Il a prévu de la louer à un ami.

Son agenda de la fin de l’année 2019.

La ferme de Mathieu pendant le confinement au mois d’avril 2020.

Sept heures du matin, au petit déjeuner avant d’aller faire le tour des vaches. « Je ne suis pas enfermé, je suis tous les jours dehors. Il faut s’occuper des bêtes, faire des clôtures, entretenir le matos… Ça ne me change rien du tout à ma vie habituelle, à part que je ne vois pas les potes, que je ne fais plus d’apéro ni de barbecues. »

Mathieu fait le tour des parcelles où se trouvent ces bêtes : « Il y a moins de circulation dans les villages, on entend mieux les oiseaux, on voit des animaux qu’on voyait plus rarement comme les bergeronnettes et des martes en plein jour. Il y a moins d’activité humaine, donc personne ne les embête. Ce qui est agréable c’est le silence, on écoute que la nature. »

Mathieu cherche une vache qui manque sur la parcelle. « C’est pas innocent ce coronavirus, c’est la résultante de notre mode de consommation et de vie, comme se balader en avion. Si on tombe toutes les forêts du monde, on ne pourra plus respirer. »

Bernard, le père de Mathieu, à la retraite, dispose d’une attestation de déplacement professionnel comme aide familial agricole.

Bernard, son père, vient tous les jours l’aider sur la ferme.

Mathieu et Jordan, un voisin, se saluent avec les pieds.

Pendant le confinement son quotidien n’a pas changé, il peut circuler comme il le souhaite pour maintenir son activité.

La pluie s’est arrêtée, Mathieu en profite pour faire des clôtures. « Si cette crise peut redorer le blason des paysans tant mieux. Les médias, je m’en occupe pas. Par contre les gens que je rencontre, mes voisins, mes clients que je livre disent : « Au moins on sait ce qu’on bouffe. »

Ingrid, la copine de Mathieu et son fils Aedan vivent à la ferme.

D’ici quelques mois Mathieu passera officiellement en agriculture biologique : « C’est pour le 22 mai 2021, mes bœufs et mes génisses je vais pouvoir les vendre un peu plus cher. »

Bernard, le père de Mathieu, aide au vêlage de « Simba ». « J’ai eu une trentaine de vêlages pour le moment. Cette année c’est la lettre S. Je les ai appelées : Sardine, Salto, Sursaut, Superman, Solide, Suzette, Souris, Salsifis, Soprano, Sioul… y a plein de prénoms. »

Depuis que son associé est parti, Mathieu a diminué son troupeau au fil des ans : « Aujourd’hui j’ai 150 bêtes en tout dont 49 vaches mères et le but c’est de descendre à 40. »

Le stock de paille. « J’ai acheté une remorque pour fabriquer une roulotte. C’est un petit projet avec mes gosses pour partir dans la nature le week-end ou la prêter aux copains quand ils viennent. »

Mathieu transporte dans le godet d’un tracteur un veau pour dépanner un paysan à côté.

Achat dans un magasin spécialisé.

Mathieu prend son après-midi de libre pour emmener ses enfants à un château. « J’ai eu six jours de vacances cette année. On est parti en Lozère. On a loué un petit chalet dans un camping avec Ingrid et trois gamins. »

Mathieu passe la herse pour aérer le sol avant de semer le lendemain des céréales qui serviront à l’alimentation de ses bovins. « J’ai pas mis d’engrais, pas de chimie, ça m’aura coûté un peu de gasoil et je récupère ma semence. C’est économique et à la fois écologique, pour moi c’est plus important que de vouloir produire pour produire. »

Billy, que connaît Mathieu depuis l’enfance, vient récupérer régulièrement et gratuitement de la ferraille chez lui.

Il aide Pierre, un ami paysan, à décharger plusieurs milliers de poussins dans un poulailler.

Ingrid et Mathieu ont invité des amis à manger. Mathieu déconne en jouant du clairon des pompiers de son arrière-grand-père.

Mathieu avec Baptiste dans la cour de la ferme. « J’ai les enfants un week-end sur deux, la moitié des vacances et tous les mercredis après-midi. »

Pauline, 21 ans, fait partie du service de remplacement, elle aide Mathieu à réaliser les travaux qu’il ne peut pas faire tout seul. Mathieu : « Une femme pour ce travail est plus calme, moins bourrin avec les animaux. Il y a bien quelques femmes paysannes dans le coin mais ça court pas les rues. »

La veille du premier tour de l’élection présidentielle, Mathieu et Ingrid consultent les professions de foi des candidats.

À minuit, Mathieu exprime ses talents artistiques dans le village. « C’est une tradition depuis que je suis gamin, je fais des petits dessins sur les affiches électorales. »

Dans le bureau de vote. Mathieu va ensuite boire un verre avec le maire et des élus du conseil municipal dont il fait partie. « C’est un acte citoyen, j’ai toujours voté, même blanc. »

Devant la télé lors des résultats du premier tour de l’élection présidentielle, le 10 avril. « Houlala la catastrophe…la catastrophe ! Allez on va finir de manger, venez ! Venez, c’est bon, on sait qui c’est. C’est une catastrophe ! Allez on va finir de manger ! »

Le soir même dans la stabulation. « J’ai un veau crevé. C’était celui de la génisse qu’on faisait téter. Dans ce métier, on est confronté à la mort. »

« J’ai mal de partout, aux hanches, aux reins, c’est l’accumulation du travail. J’ai mal à la tête aussi, c’est psychologique… Le matin je ne suis plus motivé pour me lever, avant j’avais la pêche. Heureusement que j’ai mes gosses. »

« J’aime bien pailler à la main dans la stabulation. Même si j’ai une épaule qui marche mal. J’ai été en arrêt maladie pendant trois semaines en novembre 2022. »

« J’ai quelques Ferrandaises, trois mères et deux génisses et le but, c’est d’avoir un troupeau d’une quinzaine. C’est la vache locale, une vache rustique, qui a un caractère auvergnat, sympa, costaud. J’aime bien. J’ai toujours aimé ces vaches. »

« Le soir avant d’aller me coucher, je vais voir mes vaches et je leur fait un petit câlin, normal ! Et je leur fais écouter France Musique pour les détendre. »

À quelques jours de noël. « Je fais moins de chiffre d’affaires, j’ai moins de bêtes mais j’ai moins d’emmerde. »

Souvent quand il croise un ami paysan, Mathieu peut discuter un long moment au milieu de la route.

La grêle s’est abattue dans la région en juin 2022. Toutes ses toitures ont été impactées, il doit les remplacer. Malgré son assurance, il en a pour 16 000 euros de sa poche.

Mathieu fait partie d’Alternacomb, une association composée de 35 paysans qui favorise l’échange entre paysans et des pratiques agricoles alternatives. « On travaille notamment sur le bien-être animal et l’autonomie en fourrage. »

Luna a 10 ans, elle rentre au collège au mois de septembre et Baptiste aura 8 ans au mois de juillet.

À Riom, situé à 30 kilomètres de Saint-Hilaire-la-Croix, où sont scolarisés les enfants, Mathieu accompagne sa fille chez une graphothérapeute et son fils à un cour de batterie.

Il répare une clôture avec Erwan, un de ses anciens stagiaires aujourd’hui inséminateur, qui passe régulièrement à la ferme. « On a eu de l’eau tout de suite au printemps, heureusement parce que l’hiver a été sec. »

Départ dans un gîte dans le département à côté avec Ingrid et les trois enfants. « Ça fait du bien. Même une journée, ça permet de décrocher de la ferme. »

« Je serai à la retraite minimum à 64 ans mais ça va évoluer d’ici là et je pense qu’il me reste bien 20 ans à faire, donc je serai à la retraite à 67 ans. Mon père l’a été à 60 ans, il a attaqué à 19 ans. Il touche 780 euros par mois. »